Tour d’horizon : histoire et évolution du videoclip

Au cours de nos recherches, nous avons régulièrement été confrontées à des travaux portant sur l’analyse du vidéoclip en le croisant à ses contextes économiques et culturels. Cela amène souvent les auteurs à faire un détour par son « apparition », son histoire et son évolution. Si cette question est intéressante pour nous, elle ne constitue cependant pas le coeur de notre étude. Nous souhaitons donc aujourd’hui vous proposer un état des lieux de l’histoire et de l’évolution du videoclip, en s’appuyant sur les écrits de divers auteurs. Ce petit article fera donc office de synthèse de nos lectures sur ce thème et sera pour nous un complément à notre écrit final !

La plupart des auteurs s’accordent à attribuer l’apparition du videoclip tel qu’on l’entend aujourd’hui à la chaîne MTV, créée en août 1981. Chaîne musicale de diffusion de vidéoclips et d’émissions spécialisées dans la musique.

D’autres chercheurs ne rejoignent cependant pas cette affirmation et situent plutôt l’apparition du clip bien avant, en le rapprochant d’éventuels « ancêtres » : le phono-cinéma-théâtre de 1900 ; le Chronophone ; le Phono-cinéthéâtre ; etc… Le plus connu reste le scopitone, apparu en 1957. S’il est plus question de technique ici, nous pouvons malgré tout noter que l’idée d’associer du son à des images dans un format spécifique était déjà existant avant l’arrivée des techniques de production modernes et de l’industrie musicale au sens large.

Dans son article « le scopitone est-il l’ancêtre du clip ? », Audrey Orillard remet en cause le lien entre le scopitone et le vidéoclip, préférant souligner une sorte d’anachronisme au regard des contextes économiques de l’industrie musicale de cette époque – qui, selon elle, n’était pas encore une industrie à proprement parlé. Il serait ainsi plus pertinent d’évoquer l’histoire du vidéoclip en l’insérant dans un contexte d’évolution économique de la musique plus large au cours du XXème siècle. Elle souligne aussi l’importance des questions esthétiques entrant en jeu dans la réalisation de vidéoclips, ou de « chansons filmées », qu’elle distingue par ailleurs.

Il est cependant intéressant de noter la précocité des enjeux économiques du vidéoclip, dès ses premiers instants :

« Les « clips » des années 1960 apparaissent donc avant tout comme le fruit d’une politique industrielle, celle d’une société qui fabrique du matériel cinématographique et souhaite trouver un autre débouché que le circuit classique des salles de cinéma alors en perte de vitesse, (…) »

Dès lors, la logique commerciale de l’industrie musicale naissante a engendré, en appui avec les évolutions technologiques et ambitions techniques grandissantes, la création de ce nouveau format hybride qu’est le vidéoclip. Le parallèle qu’elle dresse avec les juke-boxes est aussi intéressant pour nous tant il dépend des usages des consommateurs de l’époque : le succès des scopitone (et des chansons filmées) et plus tard du vidéoclip sous la forme que nous connaissons actuellement, peut remercier aussi le succès quelques temps auparavant des juke-boxes :

« Le choix de ce type de programme résulte de plusieurs facteurs, dont le principal concerne la facilité d’usage pour les publics qui connaissent déjà, depuis les années 1930, les phonographes autosomiques – c’est-à-dire les juke-boxes. »

On remarque malgré tout une certaine ambivalence dans les discours critiques concernant l’histoire du vidéoclip : comme le soulignent Marc Kaiser et Michael Spanu, l’histoire du vidéoclip n’est pour l’heure pas figée, tant les conclusions peuvent varier dépendamment de l’angle d’approche choisi pour appréhender l’objet. Ainsi, d’un point de vue technique, le vidéoclip serait bien antérieur à 1981 – les auteurs parlent « d’encrage industriel » ; mais d’un point de vue esthétique et économique, il serait indubitablement rattaché à « l’histoire de la pop et du mainstream, des innovations et des formats. » et serait de fait inscrit « dans l’histoire des divertissements. » au sens des « logiques marchandes du petit écran ».

Aujourd’hui, les majors du disque ont compris enjeux communicationnels et économiques du vidéoclip et l’on intégré à leur stratégie de développement artistique. Les trois plus grosses majors se sont même associées pour créer un service d’hébergement de clips avec VEVO ; service relié à Youtube par ailleurs, ce qui confirme également l’importance de Youtube à ce sujet (cette question sera traitée plus en détail dans notre étude). Ce mode de commercialisation de la musique par la vidéo n’est cependant pas nouveau, comme le notait déjà Audrey Orillard dans son article :

« Les clips sont tournés par les labels, pour la télévision. »

Youtube n’est alors qu’un moyen supplémentaire de diffusion et de marchandisation de la musique et des objets audiovisuels plus largement.

En conclusion, l’histoire du videoclip est, à l’image de celui-ci : plutôt complexe. Si elle ne fait pas consensus auprès des chercheurs, il n’en reste pas moins que les considérations et prises en compte économiques et techniques sont centrales ; allant in fine jusqu’à requestionner, au fil de son évolution, la définition même que l’on donne au vidéoclip.

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