Regarder la musique : dans le dernier numéro de la revue « Volume! »…

En avril dernier est paru le dernier numéro de la revue Volume! La revue des musiques populaires. Intitulé « Watching Music – cultures du clip musical », il fait suite au colloque éponyme qui s’est tenu à la Philharmonie de Paris le 2 décembre 2016.

Si l’ouvrage est particulièrement intéressant pour notre recherche, il est aussi inédit : alors que les références anglophones sont plutôt nombreuses ; les recherches francophones sur le sujet des clips musicaux sont moins fréquentes – comme le précisent d’ailleurs Marc Kaiser et Michael Spanu.

Plusieurs articles du numéro intéressent directement notre sujet. Nous allons aujourd’hui nous attarder sur l’introduction, rédigée par Marc Kaiser et Michael Spanu : « On n’écoute que des clips! » – Penser la mise en tension médiatique de la musique à l’image.

Dans la première partie de l’article, les auteurs reviennent sur la nature complexe du vidéoclip. Ils le qualifient comme un objet multicanal :

« Ils sont non seulement visibles à la télévision et dans de nombreux espaces publics (parfois même sans son), mais également sur d’innombrables écrans via internet. »

mais aussi « protéiforme » :

« [le clip] répond à la fois aux logiques des industries et des marchés de la culture, ainsi qu’à des préoccupations esthétiques, politiques ou sociales. »

Ce constat nous interpelle dans le cadre de notre étude et fait aussi écho aux premières conclusions de nos recherches. En effet, la difficulté à définir le vidéoclip est aussi ce qui rend l’enquête scientifique dense, tant les angles d’approche peuvent être variés (sociologique, culturel, économique, esthétique…).

De plus, la notion d’usage, bien qu’elle ne soit pas directement désignée comme tel dans l’article, est mobilisée par le prisme des différents champs de recherche, sans pour autant que ceux-ci cloisonnés les uns des autres. Ainsi, les auteurs signalent un requestionnement des usages du vidéoclip avec l’arrivée du numérique et plus particulièrement d’Internet ; notamment avec les plateformes d’hébergement comme Youtube.

Par ailleurs, Marc Kaiser et Michael Spanu identifient un « paradoxe formel » dans le videoclip, lié principalement aux modes de mise en scène de la musique et des musiciens, mobilisant « l’imaginaire collectif » ou des représentations visuelles propres à chacun. Selon eux, le clip proposerait une lecture de la musique – subjective car orientée par des choix esthétiques ou économiques.

« (…), les clips déplacent le regard, il l’éloigne du travail du musicien pour l’emporter vers des formes narratives plus moins abstraites. »

Dans l’avant dernier paragraphe, les auteurs présentent divers travaux et théories plus esthétiques. Il est notamment question du lien entre les vidéoclips et les « performances dansées ». Au travers le concept de « vidéochorémorphose » développé par Elina Djebbari, ils établissent un lien entre esthétique visuelle et techniques filmographiques qui seraient un reflet de normes socio-culturelles véhiculées dans les vidéoclips. Ces propos intègrent ainsi des enjeux plus larges notamment économiques.

« En tant que producteur d’imaginaires collectifs, les clips sont dépendants des modes de représentations hégémoniques des sociétés contemporaines, (…). »

Pour conclure leur article, Marc Kaiser et Michael Spanu s’attardent sur l’articulation  entre le vidéoclip comme outil promotionnel et les dispositifs techniques permettant leur visionnage/consommation. Cette partie est particulièrement intéressante pour nous car elle aborde aussi la question des usages des vidéoclips, en parlant de « pratiques médiatiques » pour les caractériser au sens large ; en lien aussi avec les dispositifs numériques. On note par ailleurs la dimension économique et marketing (en s’appuyant sur le fonctionnement des plateforme de streaming comme Youtube) qui est ici encore mobilisée comme facteur conditionnant les usages du vidéoclip. Dans les dernières lignes de leur écrit, les auteurs recentrent leurs propos sur la définition du vidéoclip en convoquant une vision assez large du clip, caractérisant ce numéro de Volume! : il n’est pas seulement question des clips musicaux comme nous l’entendons dans notre étude.

« Le terme « clip » renvoie effectivement à une multitude de productions audiovisuelles qui mobilisent des sons et des images dans relation à chaque fois spécifique. »

 

Une partie de l’article revient aussi sur l’histoire du vidéoclip, en mettant en perspective différents travaux et en précisant que chaque considération historique du clip conditionne également sa définition. Nous reviendrons cependant sur l’histoire du vidéoclip dans un prochain article sur ce blog. Restez à l’écoute !

 

Les + de l’article : étant une introduction, ce format a l’avantage de présenter de manière générale tous les aspects traités dans la recherche concernant le vidéoclip. Il comporte ainsi de nombreuses références bibliographiques et les confronte les unes aux autres, comme un état des lieu des études à l’heure actuelle.

 

Kaiser, Marc, et Michael Spanu. « ‪« On n’écoute que des clips ! ». Penser la mise en tension médiatique de la musique à l’image‪ », Volume, vol. 14:2, no. 1, 2018, pp. 7-20.

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